Plateformes et liseuses numériques: la revanche des indépendants?

En contrepoint des déclarations récentes des éditeurs français, Actualitté révèle qu’Apple vient de lancer sur l’iBookstore son offre en auto-édition. Plus exactement, une méthode simplifiée par laquelle un auteur propose son livre (déjà maquetté en ePub) dans les pays de son choix. Amazon comme Barnes & Nobles ont déjà des offres similaires. Il serait douteux que Google Editions et Sony ne développent pas ce marché dans les mois à venir.

Gallimard, Nourry et compagnie raisonnent dans le domaine numérique comme ils raisonnaient dans le domaine papier : la concentration de l’édition industrielle, les moyens importants de production, de diffusion et de promotion y permettaient une politique arrogante de l’offre. L’auteur se mettait à genoux pour obtenir un contrat léonin lui concédant 8 % de droits en moyenne, pour huit semaines d'espérance de vie en librairie (et en moyenne aussi). Le lecteur devait accepter les prix des étals de libraire, où 80 % des titres provenaient de 20 % des producteurs. Tout cela était vanté comme un modèle de diversité, de qualité et d'équité... par ceux qui avaient intérêt à entretenir cette légende.

Le livre numérique change la donne. Les contrats directs de diffusion proposés aux auteurs par Apple, Amazon et autres distributeurs accordent 70 % de royalties sur les ventes, soit huit fois plus que le contrat d’éditeur standard dans le monde papier. De surcroît, comme les éditeurs français développent des usines à gaz en diffusion, ils ne garantissent même pas à leurs auteurs d’être présents sur toutes les grandes plateformes existantes ou à venir dans l’année, dont celle de Google en procès avec plusieurs d’entre eux.

En 2011, un primo-auteur pourra donc sans grande difficulté* placer son livre numérique directement sur les vitrines d’Apple, d’Amazon, de Google, de Sony, et de celles des librairies françaises en ligne (type Fnac, Decitre ou autre) qui accepteront les ouvrages auto-édités. Comme il recevra 70 % du montant des ventes, il pourra proposer un prix bien plus attractif que celui des grandes maisons et bénéficier ainsi d’un avantage non négligeable sur ses compétiteurs. Car le lecteur ne peut lire tous les romans : il ira vers ceux qui proposent une large part du contenu en découverte gratuite, et la suite à un prix minime.

Des petites maisons d’édition ont également compris tout l’intérêt de la période présente. Publie.net de François Bon propose ainsi sur l’iBoookstore des textes entre 0,49 et 5,99 euros, quand la plupart des éditeurs sont au-dessus de 15 euros. Ainsi, sur l'iPad, Autre monde 3 - Le coeur de la terre de Maxime Chattam (Albin Michel) est proposé à 15,99 euros... quand on le trouve en papier et en neuf à 15,84 euros sur Amazon. 

A ceux qui objectent qu’Amazon, Apple et consorts ne sont que des multinationales avides de profits, on répondra : que la plupart des libraires sont d’ores et déjà devenus des vendeurs de papier, et qu’il en va de même pour les industriels de l’édition ; que les librairies en ligne font une part importante de leurs chiffres d’affaires sur la longue traîne, donc qu’elles ont tout intérêt à accueillir les « petits » contrairement aux librairies physiques qui privilégient les « gros » pour survivre ; qu’à défaut d’une licence globale doublée d’un site universel de téléchargement gratuit, les auteurs indépendants doivent chercher tous les moyens de diffusion de leurs œuvres ; qu’Amazon, Apple et consorts sont effectivement de simples dépôts géants et que l’auteur indépendant doit les utiliser comme tels, en développant par ailleurs une politique de lien direct avec ses lecteurs par tous les outils du web 2.0 (blog, microblogging, réseaux sociaux, etc.).

Empêtrés dans une chaîne du livre qu’ils avaient bâtie pour contrôler le marché papier, les dinosaures de Gutenberg abordent donc cette décennie décisive dans une position difficile et défensive. Comme ils n’ont pas bien pris la mesure de ce que signifie la numérisation, et conservent le ton hautain des dominants sûrs de leur fait à la manière des Nourrymard, il va de soi que j’encourage les auteurs comme les lecteurs à prendre leur indépendance.

D’autant que cette édition industrielle ne peut même plus se prévaloir d’une garantie de qualité dans les livres qu’elle propose au public, vu qu’elle a multiplié depuis trois décennies les sorties à seule fin d’occuper les étalages et de faire tourner la trésorerie. Qui n’a jamais terminé un roman ou un essai publié par une « grande » maison d’édition en se demandant comment cette œuvre insignifiante, et oubliée le lendemain, pouvait encore valoir 15 ou 20 euros ? Et qui, au contraire, n’a jamais découvert une perle publiée par une maison d’édition confidentielle ?

(*) Sous réserve que certaines plateformes ne réclament pas l'exclusivité, comme le vieux monde de l'édition. L’auteur numérique devra par ailleurs assurer deux étapes : produire en ePub un livre de bonne qualité ; assurer sa promotion sur l’Internet. Pour l’une et l’autre de ces tâches nécessaires, nous travaillons précisément avec des amis à une offre gratuite ayant pour but de faciliter la vie des auteurs comme celle des lecteurs. Des nouvelles bientôt…

1 commentaire:

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