Marielle Gallo ou Lady Gaga?

En début de semaine prochaine (1er juin), la commission des affaires juridiques de l’Union européenne doit examiner le rapport de la députée française Marielle Gallo sur le renforcement de la propriété intellectuelle (voir ici le préprojet en pdf, ici et ici des analyses de ce rapport). Il s’agit d’une consternante synthèse des diktats de tous les lobbies industriels, où le piratage de musique par un collégien est mis au même niveau que la contrefaçon d’une marque de luxe ou la fabrication clandestine de médicaments. Et où la France essaie d’étendre son Hadopi à toute l’Europe.

Le premier considérant de ce projet de rapport annonce la couleur : «les infractions des droits de propriété intellectuelle (…) constituent une menace réelle pour la santé, la sécurité des consommateurs, mais aussi pour notre économie et nos sociétés». Je me demande si les auteurs de ces lignes les relisent, s’ils prennent le temps de penser au sens et à la portée des mots, s’ils envisagent un moment qu’ils en font peut-être un peu trop, s’ils réfléchissent aux «menaces» pesant sur l’économie et sur la société en évaluant la place réelle de la propriété intellectuelle parmi ces risques. Je crains que non.

Il est vrai que Marielle Gallo est porte-parole d’un mouvement appelé «Gauche moderne» tout en étant membre de la majorité présidentielle sarkozyste, de sorte qu’invoquer la notion de «sens des mots» paraît vain. Cet improbable groupuscule se réclame dans son manifeste d’«une politique pragmatique, attentive aux résultats, à ce qui marche et à ce qui répond à la demande sociale» : comme d’un point de vue «pragmatique», la répression du piratage ne donne aucun «résultat», ne «marche» pas et qu’elle réprime une forte «demande sociale» au lieu de lui répondre, je pense que cette bouillie lexicale traduit une grande confusion mentale.

Bien moins langue de bois, deux artises viennent d’exprimer leur doute sur ces menées industrielles.

Mike Jagger déclare à la BBC qui l’interroge sur Internet et le p2p : «Les gens n’ont fait de l’argent sur leur disque que pendant une toute, toute petite période. Quand les Rollings Stones ont décollé, on ne se faisait pas d’argent parce que les compagnies de disque ne vous payaient pas ! Elles ne payaient personne ! Et puis il y a une période, entre 1970 et 1997, où les gens ont été payés, et cela très très correctement, chacun se faisait de l’argent. Mais cette période est désormais achevée. Donc si vous regardez l’histoire de la musique de 1900 à nos jours, il y a une période de 25 ans où les artistes gagnaient très bien, mais le reste du temps cela n’a pas été le cas».

Lady Gaga, qui n’a pu accumuler une fortune pendant cette période atypique de 25 ans, n’en partage pas moins le point de vue de son aîné, comme elle l’a expliqué au Times : «Je déteste ces gros groupes qui balancent juste un album, genre ‘achète-le enculé !’ C’est minable pour les fans. Vous devez sortir et faire des tournées en Inde, au Japon, au Royaume-Uni. Je ne crois pas à la manière dont l’industrie musicale se comporte aujourd’hui. Je crois à ce qu’elle était en 1982». 

2 commentaires:

  1. Merci Numérama pour la 2ème moitié de du billet...

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  2. (anonyme) Outre que Numerama est en lien dans la première partie du papier, ainsi qu'en lien permanent dans la colonne ci-contre, l'info Mike Jagger est sortie sur Boing Boing environ une semaine avant sa reprise... Et je préfère ma traduction !

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