Vers les réseaux quantiques

Une équipe chinoise vient de faire dans Nature Photonics l’annonce d’une téléportation quantique réussie sur plus de 16 km et dans le vide. Plus de 89% des états quantiques fondamentaux des particules ont été corrélés. Le canal utilisé par les chercheurs est un laser bleu, diffracté par un cristal BBO, émettant 32.600 paires de photons intriqués et polarisés par seconde. La preuve de concept de la téléportation quantique avait été apportée en 1997 et 1998 par des groupes de chercheurs travaillant à Innsbruck et à Rome. Mais jusqu’à présent, on n’était parvenu qu’à communiquer par photons interposés sur un réseau de fibre optique de quelques centaines de mètres. Le tour de force de Xian-Min Jin et de ses collègues ouvre la voie d’une communication quantique à l’échelle globale et satellitaire, puisque l’épaisseur de l’atmosphère varie de 5 à 10 km.

La téléportation quantique ne concerne pas les objets ou les personnes, comme dans la science-fiction, mais les particules élémentaires : photons, ions et autres constituants du rayonnement et de la matière. Elle tire partie d’une propriété de l’échelle quantique : après émission, deux particules intriquées conservent la « mémoire » de leurs caractéristiques communes et la modification de l’une entraîne automatiquement la modification de l’autre (non pas à la vitesse de la lumière, mais instantanément). Elles forment en réalité un seul système quantique. Or, ces particules possèdent des traits (comme le moment angulaire de leur spin) qui permettent de procéder à des calculs, car ils correspondent aux 0 et 1 des portes logiques « classiques ». En fait, ces qubits (bits quantiques) devraient à terme d’accélérer considérablement les temps de calcul, notamment procéder en parallèle plutôt qu’en série. Par ailleurs, la cryptographie quantique est potentiellement inviolable : toute interception d’un message par un tiers non autorisé entraîne sa modification, en vertu du principe de décohérence (quand un observateur interagit avec un système quantique, ici pour intercepter un message en qubits, il le modifie définitivement).

Comme j’aurais l’occasion de le préciser dans un prochain article sur les travaux de Zurek, un nombre croissant de chercheurs considèrent qu’au niveau quantique, l’univers peut être décrit comme un processeur permanent d’information : ce que nous en percevons (au niveau classique familier, celui des objets macroscopiques et de la physique newtonienne) serait simplement le résultat le plus robuste de cette communication quantique permanente et sous-jacente. Autant dire que « l’ère de l’information » ne fait que commencer et que nos réalisations actuelles, pourtant déjà surprenantes en l’espace de trois générations, ont de bonnes chances de paraître à nos descendants aussi rudimentaires que la machine à calculer de Blaise Pascal. Nos réseaux électroniques dépendent déjà de la physique quantique dans leur conception, mais ils restent prisonniers des contraintes classiques pour le calcul et la transmission.

Référence : Jin XM et al. (2010), Experimental free-space quantum teleportation, Nature Photonics, online pub, doi:10.1038/nphoton.2010.87

7 commentaires:

  1. Voilà qui malmène quelque peu la relativité générale... mais enfin "l'instantané" existe-t-il réellement en physique ? L'instantané c'est une vitesse infinie, non ?

    Cela dit : adios mon blog youareextra, impossible de me connecter sur la base de données free.
    On se demande ce que le mot "Liberté" signifie pour sarko ; mais je m'y attendais un peu. Tous ces gens sont tellement prévisibles...

    Vince

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  2. (Vince) Ce sont les bizarreries quantiques. Einstein lui-même, dans son article EPR des années 1930, émettait une série d'objections et supposait que nous manquions de variables pour comprendre le comportement quantique. Mais non, les expérimentations (sur des photons ou neutrons uniques, ou des atomes froids, ou des matériaux supraconducteurs et superfluides) ont depuis montré que la théorie est bonne. En fait, deux particules intriquées forment un système unique malgré la distance qui peut les séparer, donc l'ensemble de ce système réagit instantanément à son environnement, par exemple une détection par un appareillage.

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  3. Vraiment, la théorie d'Einstein n'est pas complète ni imparfaite (rien ne prouve aujourd'hui la réalité physique de l'espace-temps).

    Pour en revenir aux particules : je doute que l'interaction entre particules soit instantanée, on croit qu'elle est instantanée car notre observation a ses limites et reste dépendante des techniques utilisées. Très probablement, de nombreuses interactions ont lieu à un niveau inférieur aux particules "élémentaires" actuelles, mais on ne les voit pas.

    Les particules que l'on détecte aujourd'hui sont loin d'être élémentaires, le LHC du Cern monte à 14Tev, et on observe de nombreuses sources gamma largement supérieures dans l'espace, un exemple ici :
    http://www.mpi-hd.mpg.de/hfm/HESS/pages/home/som/2005/06/

    Alors pour le Big Bang... on est encore très, très loin des particules élémentaires... ;)

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  4. (anonyme) Votre objection est justement celle de l'article EPR : des variables cachées vont permettre de rétablir un réalisme local. Mais non, on a découvert des dizaines de particules et d'antiparticules, dont la plupart ne vivent qu'un pouillième de seconde, il n'empêche qu'une particule déjà bien connue, manipulable et observable (comme un photon, un électron, etc.) se comporte bel et bien comme le prédit la théorie. L'expérience d'Aspect au début des années 1980 a sonné le glas des objections de type EPR, et de nombreuses autres avancées depuis ont cloué le cercueil (comme l'effet tunnel, qui défie aussi bien la mécanique classique et qui fonctionne pourtant très bien !)

    Ensuite, l'approche quantique de l'espace-temps (dont la gravitation) est bien sûr le Graal de la recherche actuelle en physique des particules, astrophysique et cosmologie... avec beaucoup d'hypothèses et de modèles mathématiques, mais pas beaucoup de consensus ni surtout d'expérience ou d'observation décisives sur l'ensemble des paramètres impliqués. D'où le foisonnement de spéculations.

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  5. Ok, ok ! mais l'électron n'est pas une particule élémentaire, il peut se fragmenter en d'autres particules...

    J'en suis convaincu, on va découvrir beaucoup d'autres particules au fur et à mesure qu'on augmentera la puissance des accélérateurs... la recherche des particules élémentaires n'est qu'une vaine quête ! ;)

    Vince

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  6. (Vince) Cette objection est non-pertinente : même si l'on découvre une sous-structure des particules aujourd'hui qualifiées d'élémentaires (leptons, quarks et bosons), il n'empêche que celles-ci se comportent bel et bien de manière conforme à la théorie et l'observation quantiques... et de manière différente des corps au niveau classique (la superposition, l'intrication, etc.). C'est la raison pour laquelle les physiciens ont entrepris de réformer la vision classique (newtonienne puis einsteinienne) à partir de l'approche quantique, et non l'inverse qui serait un non-sens vu la masse de données accumulée depuis 1900 sur la réalité des propriétés quantiques. Mais mon papier à venir sur Zurek permettra d'approfondir cela et aussi de réfléchir en quoi l'information peut être qualifiée de grandeur physique.

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