Le Minitel 2.0 est enfin disponible!

D’après les chiffres fournit par Apple, l’iPad s’est écoulé à 300.000 exemplaires sa première journée. Et, phénomène plus intéressant encore, 250.000 livres auraient été téléchargés en l’espace de 24 heures. Reste que l’iPad est un produit Apple, que les livres s’écoulent principalement par le biais de l’AppStore, avec tous les défauts intrinsèques de ces supports volontairement propriétaires, fermés et commerciaux (même si la firme à la pomme a mis les livres gratuits du Projet Gutenberg en produits d’appel). Je dis «défauts» en pensant au lecteur, bien sûr, celui qui cherche le maximum de choix et de liberté en achetant un outil comme l’iPad. Mais les éditeurs et producteurs de contenus trouvent au contraire toutes les qualités à de tels supports, puisqu’ils sont orientés vers le contrôle.

PS me signale dans Libération (miraculeusement ouvert et gratuit) une intéressante analyse de l’iPad par Marin Dacos, ingénieur de recherche au CNRS et directeur du Centre pour l’édition électronique ouverte (Cléo).

M. Dacos interprète ainsi la popularité d’Apple auprès des producteurs de contenu : « Les acteurs imaginent que l’iPad va réintroduire un contrôle du marché. Le Web a été conçu comme une logique de circulation du savoir, où le micropaiement n’est pas le cœur du dispositif. C’était le cas du minitel, payant à chaque consultation dans un contrôle vertical. Dans l’espoir de capter l’utilisateur, Apple a construit sa stratégie autour du micropaiement. Pour entrer dans le système, dans l’iPhone en particulier, l’utilisateur est obligé de devenir un consommateur abonné. Ce système induit une verticalité, un contrôle, alors que le Web est très horizontal, sans centre. »

Et l’auteur précise : « Il faut replacer la question de l’iPad dans la problématique du trio Apple-Amazon-Google, qui constitueraient trois hubs à l’échelle mondiale de diffusion de textes électroniques. (…) Faut-il laisser la distribution de la culture à une poignée d’acteurs ou à un nombre infini ? Le projet BookServer, de l’Internet Archive, se veut un système ouvert mis à la disposition de tout éditeur, libraire ou bibliothèque, centralisant la vente de livres sur Internet où les lecteurs du monde entier peuvent les acheter. Tout en laissant le contrôle des tarifs aux détenteurs de droits. Un petit éditeur brestois aura donc le choix entre négocier avec Apple ou s’adresser à tous ceux qui aiment le livre. Entre le mode fermé ou le mode ouvert. »

Ce projet BookServer de l’Internet Archive promet donc un système totalement ouvert de diffusion et distribution du livre, où pourront déposer aussi bien les éditeurs que les libraires, les bibliothèques et les auteurs, chacun de ces acteurs précisant le régime de droit et le prix attachés au texte. Une plateforme neutre et ouverte, où l’offre payante est au même niveau que l’offre gratuite, voilà qui semble réjouissant. Un détail : je ne vois pas bien comment le prix unique du livre décrété dans une zone donnée pourra survivre à cette globalisation de fait de la distribution.

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