Hadopi : une balle dans le pied

Le groupement d’intérêt scientifique M@rsouin vient de publier une étude sur les premiers effets de la loi Hadopi. Comme on pouvait s’en douter, les nobles intentions du complexe politico-industriel ont de bonnes chances d’aboutir à un désastre. La matraque des pouvoirs publics et des lobbies privés ne s’est certes pas encore abattue sur les affreux « pirates », donc il est bien trop tôt pour conclure. Mais enfin, comme le montrent les principaux points de l’étude reproduit ci-dessous, c’est mal parti. Quand le peer-to-peer a été abandonné (15% des cas), c’est surtout pour se diriger vers d’autres solutions que le législateur n’a évidemment pas la capacité d’anticiper – mais ce législateur peut pondre loi sur loi dans une course en avant liberticide, bien sûr, cela ressemblerait assez au style de notre président. Le point le plus intéressant : les « pirates » se révèlent aussi de gros consommateurs de biens numériques payants, de sorte que couper l’accès à Internet réduirait du quart le marché de ces biens, voire de la moitié en cas d’application rigoureuse de la loi ! Les majors de la musique et leurs amis du gouvernement se tirent donc une balle dans le pied. On ne versera pas une larme si ça fait mal…

Quelques conclusions de l’étude :

- A peine 15% des internautes qui utilisaient les réseaux peer-to-peer avant l’adoption de la loi Hadopi ont définitivement cessé de le faire depuis. 

- Parmi ces ex-téléchargeurs, seulement un tiers a renoncé à toute forme de piratage numérique, alors que les deux tiers restant se sont tournés vers des pratiques alternatives de piratage échappant à la loi Hadopi comme le streaming illégal (allostreaming,...) ou le téléchargement sur des sites d’hébergements de fichiers (megaupload, rapidshare,...).

- Bien que  le nombre d’internautes fréquentant les réseaux peer-to-peer ait diminué, le nombre de « pirates numériques » a légèrement augmenté depuis le vote de la loi Hadopi.

- (…) les « pirates numériques » se révèlent être, dans la moitié des cas, également des acheteurs numériques (achat de musique ou de vidéo sur Internet). Couper la connexion Internet des utilisateurs de réseau Peer-to-Peer pourrait potentiellement réduire la taille du marché des contenus culturels numériques de 27%. Une extension de la loi Hadopi à toutes les formes de piratage numérique exclurait du marché potentiellement la moitié des acheteurs de contenus culturels numériques.  

5 commentaires:

  1. rien à foutre de tes sujets à la con.

    pauvre vieux salope.

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  2. De l'information dépend l'opinion publique, uniquement d'elle. Probablement Internet devrait devenir un media de plus en plus influent, d'où le désir de contrôle du pouvoir et des lobbies. Mais comme c'est la peur qui les guide leurs réactions sont forcément peu rationnelles ! :)

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  3. à propos d'Internet, de libre circulation et de l'apport créatif des internautes ... (Christine)
    "Nathalie Kosciusko-Morizet a installé le 24 février un groupe d'experts sur la "neutralité du Net". Le débat national sur ce sujet complexe, qui a de nombreuses implications économiques et sociétales, se poursuivra avec le lancement début mars 2010 d'une consultation publique sur internet.

    Qu'est-ce que la "neutralité du Net" ? C'est à cette question que le groupe d'experts installé par Nathalie Kosciusko-Morizet devra répondre. Il s'agira d'ailleurs plutôt de délimiter et de borner cette exigence de neutralité, alors que le débat est encore très ouvert en France et en Europe. Le Gouvernement doit rendre un rapport sur ce sujet au Parlement d’ici à fin juin 2010, conformément à la loi sur la fracture numérique, votée en décembre 2009.

    "Neutralité des réseaux" ou "neutralité de l'internet" ?
    La neutralité du Net est "un principe fondateur d’internet qui garantit la libre circulation, sans discrimination des contenus sur le web", a précisé la secrétaire d'Etat. "Mais parle-t-on de la neutralité des réseaux ou de la neutralité de l'internet", s'est-elle interrogée en présence du groupe d'experts. "De la neutralité des contenus ou de la gestion des contenus ? Et le terme même de "gestion des contenus" a-t-il un sens ?", a-t-elle poursuivi. "Et, à l'intérieur de ces catégories [réseaux, contenus], que faut-il garantir et avec quels niveaux d'exigence ?"

    L'enjeu est notamment économique : il faut placer les exigences de régulation au bon niveau pour s'assurer que de nouveaux acteurs du Net puissent émerger et préserver la capacité d'innovation. La définition de la neutralité du Net peut donc avoir des conséquences importantes en matière de libre concurrence et de régulation des acteurs dominants du marché.

    Mais les enjeux sociétaux sont également multiples : respect de la vie privée des internautes, garantie de la liberté d’expression, qualité et continuité des services offerts sur internet.

    "Le développement des usages mobiles incite les opérateurs à surveiller de très près les différentes pratiques des mobinautes, afin de déterminer quels usages ont le plus d’impact sur les infrastructures de télécommunication, précise par exemple le communiqué. Des craintes s’expriment sur la capacité technique qu’ont acquise les opérateurs et qui pourrait leur permettre de discriminer les contenus et les protocoles."

    Enfin, la neutralité du Net s’applique aux rapports entre les infrastructures, les applications et les contenus "dans le cadre d’une utilisation légale". Elle ne s’oppose donc pas à l’application de la loi. En revanche, "une question importante, et débattue en ce moment, reste celle des techniques qui peuvent être déployées pour empêcher la diffusion de contenus illégaux, et de leur impact éventuellement néfaste sur l’accès aux contenus légaux", a précisé Nathalie Kosciusko-Morizet. "Nous tenons à un internet multiple, ouvert et innovant", a souligné la secrétaire d'Etat après les interventions des experts.

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  4. En deux fois, because, trop de caractères !

    "Une consultation publique lancée début mars
    Nathalie Kosciusko-Morizet a souhaité associer aux travaux préparatoires l’ensemble des acteurs concernés en organisant un débat national sur le sujet. "La neutralité du Net fait partie de ces sujets en apparence réservés aux initiés mais qui touchent en réalité l’ensemble de la société. C’est pourquoi il m’a semblé essentiel que chacun puisse s’emparer de ce débat pour exprimer ses attentes et ses positions", a souligné la secrétaire d’État.

    Le débat sera rythmé par différents temps forts d’ici à juin prochain : une consultation publique, lancée sur internet début mars, et une série d’auditions des différentes parties prenantes conduites par la Direction générale de la compétitivité de l’industrie et des services (DGCIS) avec le concours de la Délégation aux usages de l’internet (DUI).

    Préserver un "internet multiple, ouvert et innovant"
    Au niveau européen, la Commission a annoncé une communication sur ce thème dans les prochains mois. Le paquet Télécom, adopté en décembre dernier, prévoit une série de dispositions visant à renfoncer la transparence et l’information du consommateur en matière de gestion des réseaux par les opérateurs.

    Aux États-Unis, la Federal Communications Commission (FCC) travaille également sur le sujet ; l’administration américaine a fait du respect de la neutralité du réseau une condition de l’octroi des aides publiques au déploiement de l’infrastructure. On voit l'importance stratégique de ce débat alors que la France s'apprête à investir dans le numérique dans le cadre des investissements d'avenir."
    Michel Cosnard, PDG de l'Institut national de recherche en informatique appliquée (Inria)
    • "La neutralité du Net est plus un enjeu sociétal que technologique, il touche à la sphère privée, sociale, individuelle."

    • "Le réseau doit garantir une transparence, une ouverture, qui garantissent la "confiance" (trust), un élément essentiel du développement du Net. La confiance, c'est par exemple la confiance dans le respect dans la vie privée. Si j'ai une vie sociale sur le réseau, j'ai confiance dans le réseau, dans le fait que celui-ci ne peut utiliser contre moi ma vie sociale sur le réseau (…). Les chercheurs peuvent apporter des mécanismes techniques qui permettront ce respect de la vie privée, ce droit à l'oubli sur internet."

    • "La "confiance" permet de garantir l'innovation [et de lutter contre] une tendance grave, la tendance au monopole (…). Le rôle des autorités publiques est de garantir que ces situations de monopole ne conduisent pas à des désordres de nature diverse."

    Tarik Krim, entrepreneur du Web et fondateur de Netvibes
    • "Une société comme Twitter n'a fait que suivre les recommandations des internautes [pour se développer]. Sur internet, les systèmes ouverts sont les plus performants parce qu'ils laissent émerger des utilisations auxquelles on n'avait pas pensé. [La création d'une société de ce type] est un processus itératif, qui ne permet pas de planification sur un ou deux ans. On lance 35 % du produit et on continue [à le développer] avec les utilisateurs, grâce à leurs retours d'information."

    • "L'écosystème doit permettre l'émergence de nouvelles sociétés (...). Il faut préserver la neutralité du Net pour permettre le renouvellement des acteurs [notamment économiques]."

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  5. (anonyme 1) Cher Krane, quel plaisir de te lire.

    (Vince) En effet, Internet est un enjeu de pouvoir et donc un enjeu politique. Mais une politique qui ne ressemble évidemment plus du tout à sa version politicienne (qui mobilise de moins en mois les citoyens), car celle-ci se trouve également remise pas en cause par la translation numérique des enjeux. J'y reviendrai plus tard.

    (Christine) Merci de ces informations et ce débat sera intéressant (Lawrence Lessig fait partie du comité d'experts je crois). J'ai lu à ce propos (pas de référence sous la main) une observation amusante d'un responsable Google Europe, qui disait en substance : "il y a des dizaines de milliers de fonctionnaires qui travaillent sur le droit des brevets, contrats, copyrights, etc... mais pas un seul qui travaille sur un autre droit appelé liberté d'expression". Je n'attends pas d'un quelconque pouvoir institué qu'il aborde une problématique du point de vue de la liberté individuelle... mais j'attends cela des individus!

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